Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait (M.Twain)

Innovations managériales

Par Julien Tréfeu

 

Depuis plus de 8 ans que j’accompagne des entreprises à développer leurs pratiques collaboratives et que je forme des managers à être 3.0, collaboratifs, humains… (J’avoue que je ne sais plus trop quel terme convient le mieux !), je suis régulièrement frappé par le bon sens de nos échanges et la réceptivité dont ils peuvent faire preuve :

  • "Favoriser la coopération entre ou avec mes collaborateurs ? Evidemment !
  • Leur laisser plus d'autonomie : cela va de soi !
  • Plus de responsabilités, de possibilité d'actions ? Bien sûr !"

 

En d’autres termes, mes interlocuteurs semblent, dans la majorité, plutôt enclin à développer la collaboration dans leur organisation. Surtout que de nombreux articles et études viennent corroborer cette nécessité de remettre l’humain au cœur. Des valeurs telles que la confiance, la transparence, la responsabilisation sont de plus en plus présentes dans les entreprises.

Il suffit pour cela de taper « entreprise humaine »  ou « entreprise et collaboration » pour obtenir plus de 59 millions de résultats sur Google pour chacune des recherches. Sans compter également sur les mouvements de type « entreprise libérée » ou encore de « management agile ».  Au-delà du côté un peu marketing, il y a quand même une véritable nécessité aujourd’hui de trouver de nouveaux leviers de performance dans nos organisations. Et l’humain, pour beaucoup de personnes, est la réponse.

Donc pourquoi semble-t-il perdurer un véritable blocage dans nos organisations privées et publiques ? Pourquoi le constat de ma casquette de consultant ou de formateur est régulièrement le même : la collaboration et la coopération sont très difficiles aujourd’hui à pérenniser  et à généraliser dans le fonctionnement actuel de nos structures.

Alors oui, bien sûr, passer d’une organisation taylorienne très top/down à base de découpage de processus et d’optimisation à une certaine agilité est loin d’être une évidence. Et il faut beaucoup de courage aux Directions pour s’engager dans ce chemin. C'est un fait établi et partagé par les experts, la libération de l'entreprise et de l'organisation demande beaucoup de ténacité et de persévérance pour les comités de direction. C'est un chemin ambitieux sur lequel le demi-tour est interdit et la demi-mesure quasi impossible. En effet, faire des propositions d'action aux collaborateurs et ne pas les tenir est potentiellement pire que de n'avoir rien initié !

La peur de perdre sa position de manager comme détenteur de l’information, comme celui qui donne les directives, est certainement d’ailleurs l’un des freins majeurs. Mais je suis persuadé qu’il y a autre chose.

Et c’est l’un des participants  à une formation qui m’a donné un nouvel élément de réponse. Alors que j’évoquais la nécessité de responsabiliser les agents dans leurs activités pour les inclure dans une organisation plus agile, un cadre supérieur de la fonction publique me dit : "Quand bien même je donnerais cette possibilité à mes agents qu'ils ne la voudraient pas. Ils sont dans leurs habitudes depuis 15 ans et n’ont aucune velléité de changement.  Et ils n'en seraient probablement pas capables."

Cette réflexion est venue profondément me questionner : Ces agents étaient-ils effectivement incapables de changement et de tendre vers plus de responsabilités ou est-ce qu’il s’agissait en fait de la croyance du manager ? Et si nous posons cette question de manière plus générale, nous pourrions nous interroger sur la capacité et l’envie de l’Homme à tendre vers plus de coopération et d’échange avec les autres.

Ce qui m’intéresse ici n’est pas tant la réponse à la question : l’Homme est-il un être de nature profondément coopérative ou d’avantage tourné vers soi et sa satisfaction personnelle mais plutôt la croyance que nous développons à ce sujet. Je suis convaincu aujourd’hui que l’un des freins majeurs à l’humanisation des entreprises est notre croyance profonde en la nature humaine.

En effet, si, en tant que manager, je suis convaincu que l’être humain est de nature plutôt égoïste, à savoir qu’il va davantage tendre vers l’affrontement plutôt que vers la collaboration, il est alors évident que je ne m’engagerais pas vers la coopération pour piloter mon service. Bien au contraire, je gérerais mon activité avec des reporting serrés me permettant de contrôler la qualité, les coûts et les délais pour chacun de mes collaborateurs. De même, je valoriserais la compétition au sein de mes équipes pour augmenter mes résultats.

Le débat semble peut-être simpliste. Bien évidemment, ce genre de pilotage managérial émane également d’une vision financière de l’organisation à court terme. Cependant, je suis intimement persuadé que cette croyance fondamentale en la nature coopérative de l’Homme détermine l'aspiration d’évolution des entreprises vers plus de collaboration. Et bon nombre de leaders qui ont opéré ce changement semblent totalement partager cette croyance. Convaincu par une aspiration plus grande et sachant pertinemment qu’ils ne pourraient l’atteindre tout seul, ils ont appris à s’entourer et surtout à faire confiance. A l’instar d’un Nelson Mandela, d’un Steve Jobs ou d’un Martin Luther King (la comparaison ayant certaines limites…) ces nouvelles organisations doivent passer par une croyance profonde que l’Homme, lorsqu’il agit en groupe, peut atteindre de merveilleux résultats. Et nous avons aujourd’hui, plus que jamais, besoin de leader qui font le choix de miser sur le potentiel collaboratif des Hommes. De plus, il n’est pas impossible que ce genre de pensées soit contagieuse. Comme dirait l’autre, parfois, il suffit d’y croire !

Et vous, quelle est votre croyance ?

Nous sommes à votre disposition pour répondre à toutes vos questions.

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